Alfred Marx, «L’impureté selon P. Une lecture théologique», Vol. 82 (2001) 363-384
This study sets out to review the different factors of impurity recognized as such by P. In the final analysis, these come down to two: death (with which ‘leprosy’ is connected) and sexuality. Whatever the original reason for considering these two factors as a source of impurity, P. has given them a theological reinterpretation by which he relates them to the story of the Fall; death and sexuality are characteristics of the human condition that are a result of the Fall, whereas the impurity which they bring about calls to mind the dissolution of the original connection between man and God.
On sait que pour M. Douglas, dont les thèses en la matière ont été déterminantes, le corps humain symbolise le corps social, qu’il en est le miroir, de sorte que les impuretés liées au corps signalent des dangers perçus par la société. L’impureté associée à tout ce qui est écoulement, à tout ce qui traverse la peau, qui est la frontière du corps, traduit ainsi une anxiété par rapport à tout ce qui menace l’intégrité de la société. Parlant d’Israël, M. Douglas écrit:
Tout au long de leur histoire les Israélites furent minoritaires et firent l’objet de vives pressions. Selon leurs croyances, toutes les sécrétions corporelles étaient sources de pollution — sang, pus, sperme, etc. Leur souci d’intégrité, d’unité, de pureté du corps humain reflète très exactement les craintes qu’ils éprouvaient à l’endroit des limites de leur corps politique23.
Cette correspondance entre corps physique et corps social permettrait d’ailleurs aussi de rendre compte du fait que la "lèpre" et la mort sont considérées comme des facteurs d’impureté, la décomposition du corps du "lépreux" / du cadavre reflétant, dans cette perspective, la crainte de la décomposition de la société.
Mais toute sécrétion corporelle n’est pas regardée comme impure. En crachant sur sa fille, son père ne la rend pas impure, mais la met dans la honte (Nb 12,14). L’urine n’est pas tenue pour impure et, à la différence d’Ez 4,15, P ne considère pas comme tels les excréments. En outre, comme le fait d’ailleurs remarquer M. Douglas dans sa récente monographie sur le Lévitique, toute perte de sang, telle que saignement de nez ou blessure, ne rend pas impur24. Et ce n’est donc pas simplement parce qu’il y aurait perte de vie — vie que contient le sang, ou vie potentielle du sperme, perdue au cours d’une pollution nocturne — qu’il y a impureté25. Si tel était le cas, l’effusion de sang consécutive à une blessure, où le risque de mort est autrement plus important que dans le cas de simples règles, aurait dû être tenue pour un facteur d’impureté majeur. Or, ce n’est pas le cas. Car, ainsi que l’a souligné Whitekettle, seuls sont considérés par P comme impurs les écoulements d’origine sexuelle26. Mais si ceux-ci rendent impur, ce n’est pas non plus, comme le pense Whitekettle, parce qu’ils signalent un dysfonctionnement, soit que l’écoulement sexuel de l’homme ne