Samuel Bénétreau, «Évangile et prophétie. Un texte original (1 P 1,10-12) peut-il éclairer
un texte difficile (2 P 1,16-21)?», Vol. 86 (2005) 174-191
It is commonly agreed that the
Second Epistle of Peter evinces a knowledge of the First Epistle of Peter
(cf 2 P 3,1), but the degree of the influence upon the Second Epistle is
assessed differently. This study endeavours to show that the difficult
text of 2 P 1,16-21, in which the witness of the apostles is associated
with the "prophetic word", becomes clearer and more coherent when a connection
is set with 1 P 1,10-12.
Évangile et prophétie 179
renvoie lui-même au développement précédent (3-11), une sorte de
résumé du message chrétien dans ses deux aspects conjoints: la
munificence des grâces divines et la nécessité, à partir de ces grâces,
d’une piété forte, résolue, seule apte à assurer un large accueil dans «le
Royaume éternel de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ». «Ces
choses» sont donc l’Évangile du Christ vu comme une globalité
impliquant une grâce qui oblige. On note que dans les versets 12-15,
au ton très personnel, la responsabilité apostolique s’exerce dans le
présent (v. 13), mais concerne aussi l’avenir, la génération suivante,
par la mise à disposition des enseignements indispensables (v. 15).
Au début du verset 16 le climat change: une négation vigoureuse
annonce un propos polémique: «Ce n’est pas, en effet, en suivant des
fables sophistiquées que nous vous avons fait connaître …». On peut
considérer cet accent polémique soit comme une défense de l’auteur
devant des critiques portant sur l’annonce de l’Évangile, soit comme
une attaque visant les discours d’adversaires. La décision importe peu
pour notre étude, mais, avec un bon nombre de commentateurs, nous
considérons comme vraisemblable une réaction au dénigrement de la
prédication chrétienne, accusée de recourir à des «mythes» et à des
«habiletés». L’intention est alors de revendiquer le sérieux du discours
chrétien qui ne relève nullement d’une imagination débridée et de
propos fallacieux. Un choix beaucoup plus lourd de conséquences
s’impose dès ce verset 16 puisqu’il touche à la nature du message
apostolique signalé par la formule «la puissance et l’avènement de
notre Seigneur Jésus Christ». Deux interprétations s’affrontent. L’une,
qui a les faveurs de nombreux modernes, repose sur une conviction
très simple et très ferme: le mot parousiva, «avènement», «venue»,
est une référence à la parousie glorieuse de Jésus à la fin des temps,
le terme ayant acquis chez les chrétiens ce sens «technique». La
présence de duvnami" comme premier terme du couple n’est pas
gênante, dit-on, car on aurait un hendiadys, le sens global étant
«l’avènement puissant», «l’avènement en puissance». Selon cette
lecture «eschatologique», l’objet de 16-18 serait déjà la promotion de
l’espérance chrétienne (elle sera développée au chapitre 3), une
espérance dénigrée comme impliquant un mythe irrecevable. La place
faite à l’épisode de la transfiguration (v. 17-18), dit-on, justifierait
cette thèse car la glorification de Jésus y serait comme une annonce et
un prototype de la parousie future. L’autre interprétation, plus sensible
au lien avec ce qui précède immédiatement où il s’agit de l’Évangile
du Christ en général, et surtout soucieuse de la rigueur du raisonne-