Claude Lichtert, «Récit et noms de Dieu dans le livre de Jonas», Vol. 84 (2003) 247-251
The problem of the different names of God in the book of Jonah is regulary discussed by researchers. There have been attempts to resolve this question through diachronic hypotheses (as part of literary criticism), as well as by synchronic hypotheses which attribute the choice of different names for God to semantic associations or to the structure of the story as a whole. This study offers an interpretation which considers the changes in the name for God as a function of the narrative. Thus, the very act of naming God comes from the story itself and through the interaction of its characters. The analysis offered here, after a brief study of each chapter of the book, shows that the double divine name ("YHWH God") is the term that brings out the positive or negative twists and turns in the narrative. In brief, Jonah makes his way through the story with different names for God, each indicating how God’s relation with others is positivie or not.
Une première lecture du livre de Jonas permet d’observer une quintuple distinction parmi les noms divins: "YHWH", présent dans les quatre chapitres mais absent en 3,5-10; "mon / ton / son Dieu", avec un déterminant possessif à la 1re, 2e ou 3e p.s., absent du deuxième acte, soit les chapitres 3 et 48; "le Dieu", expression absente du deuxième chapitre; "Dieu", sans article ni suffixe, absent du premier acte; "YHWH-Dieu", absent du troisième chapitre9. Aucun chapitre, ni acte d’ailleurs, ne contient à lui seul les cinq dénominations10. Au plan narratif, aucune d’elles n’est réservée à un unique acteur dans le récit; seul le narrateur utilise les cinq formes. J. Magonet se contente quant à lui d’une triple distinction qu’il justifie ainsi: Dieu est adoré par les marins (Jon 1) et les Ninivites (Jon 3); le Dieu est Dieu Un et Universel reconnu par le chef d’équipage (1,6) et le roi de Ninive (3,9-10), identifié — seulement par les marins — comme étant YHWH (1,10-16), le Dieu d’Israël. Un autre système prendrait forme en Jon 2 et 4 dans le cadre de discussions intra-israélites, entre Jonas et Dieu. Ici, Magonet ne distingue plus Dieu et le Dieu. Finalement, Magonet rejoint l’interprétation rabbinique qui affirme que YHWH est le terme générique des attributs de la miséricorde, tandis que Dieu est réservé à la stricte justice11.
Plus succinctement, A. et P.-E. LaCocque tentent une autre approche. Dans sa relation avec Jonas, Dieu est toujours YHWH, sauf en 4,7-9. Par rapport aux marins, il est Dieu, mais il devient YHWH après avoir été identifié devant eux par Jonas (1,9). Pour Ninive, il est Dieu. LaCocque explique l’exception de 4,7-9 en fonction du contexte de la nature: "Il ne devient YHWH que quand le plan naturel est remplacé par le plan historique, là où la bonté de Dieu est à nouveau soulignée (4,10)"12. Malgré ces constatations, il faut reconnaître que la recherche biblique sur ce sujet complexe semble contraster par rapport à la modicité des résultats.
"La nomination de Dieu est [...] d’abord une nomination narrative" écrit P. Ricœur13. Dans cette ligne, peut-être la problématique des noms de Dieu